Nous avons une mission : déconcentrer l’innovation

La France comptait en 2021, année de leur dernier grand recensement par l’INSEE, plus d’un million de startups. Leur nombre est sans doute encore plus conséquent aujourd’hui – et nous pouvons nous en réjouir, comme je l’ai déjà fait en ce début d’année. Nos jeunes pousses montrent une belle vitalité… en particulier en Île-de-France, qui en concentrait près d’1 sur 2.

La question de l’intégration des territoires dans l’innovation se pose irrémédiablement, avec deux exigences : donner aux aspirants entrepreneurs les moyens de créer leur entreprise, et donner à nos esprits vifs la nourriture intellectuelle nécessaire à ouvrir leurs horizons. D’un côté, l’infrastructure économique, de l’autre, l’infrastructure éducative. 

Ma conviction profonde, c’est que si nous voulons répondre à cette question, nous devons partout en France faire confiance aux acteurs locaux.  

L’autonomie a du bon – surtout quand l’État la soutient

Depuis les années 2000, la France a multiplié les lois de décentralisation pour l’enseignement supérieur – loi « LRU » de 2007, loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche de 2013, loi « 3DS » de 2022. Aboutissant notamment à la création des ComUE (« Communautés d’Universités et d’Établissements ») et aux établissements dits « expérimentaux » (EPE) comme l’Université Paris-Saclay. Trois d’entre eux ont ainsi pu se propulser dans le classement de Shanghai, standard international en matière universitaire : Paris-Saclay, Paris Sciences et Lettres et Sorbonne Université.

Si la prévalence de notre région capitale se fait encore sentir, primauté chronologique des établissements et forte concentration des institutions obligent, les résultats de ces politiques devraient néanmoins se faire sentir tôt ou tard dans tout le pays. En témoigne l’attractivité du format, qui a mené à la constitution de 14 EPE en 2022.

Côté entrepreneuriat, on observe des dynamiques similaires. Une concentration francilienne comme point de départ, et un mouvement de déconcentration qui accompagne son succès.

Le label French Tech, créé en 2014, distingue aujourd’hui 16 capitales (dont Paris-Saclay !) et 32 communautés sur le territoire national. Depuis près de 10 ans, son expansion a boosté des initiatives partout en France et s’est naturellement accompagnée d’une hausse constante des fonds levés par les start-ups françaises. La promotion 2023 du French Tech 120 en témoigne, avec environ 40% d’entreprises créées hors d’Île-de-France, comme les licornes Swile (Montpellier) et Exotec (Hauts-de-France), ou encore l’entreprise Verkor (lien).

Ces résultats sont encourageants. Oui, dans l’éducation comme dans l’innovation, des programmes nationaux peuvent booster des créations locales. Cela tombe bien, car elles sont nombreuses.

Les innovateurs Français ont horreur du vide

Partout en France, que des établissements « d’élite » et des industries de pointe soient implantées à proximité ou non, les initiatives visant à accompagner les jeunes entrepreneurs se multiplient. Formations, accompagnement administratif et dans la recherche de financement… : quelles que soient leurs formes, toutes nous montrent que, même éloignés des réseaux de la capitale, les Français ont soif de créer.  

L’alliance scellée par la communauté d’agglomération Valence Romans Agglo et le groupe Archer, spécialiste du développement local, en est l’exemple parfait.

Profitant du programme national Investissement d’avenir, la collectivité et l’entreprise « d’intérêt collectif » ont obtenu un financement étatique de 22,5 millions d’euros sur 5 ans pour créer le fab.t, un établissement public local visant à faire émerger 100 à 150 startups (environ 1 500 emplois) sur leur territoire. Des financements employés notamment à former une nouvelle génération de jeunes entrepreneurs dans la Drôme.

Nous, élus de la République, devons encourager les efforts pour le développement local

Notre pays regorge de talents et d’envie. On pourrait égrainer longtemps les exemples comparables au fab.t, tant la demande pour ces structures est forte. Elle nous rappelle aussi que notre maillage territorial est encore imparfait quand il s’agit de se former à l’entrepreneuriat et se lancer pour de bon.

Les startups et les talents d’aujourd’hui font les emplois et les fleurons de demain.

Si nous voulons triompher dans la bataille des compétences et pour l’innovation, nous, élus de la République, devons les soutenir et les aider à développer l’infrastructure adéquate, de Kourou à Saclay en passant par Valence, Quimper et Fort-de-France.

Plus nous réussirons à multiplier les clusters regroupant à la fois enseignement public, recherche fondamentale, recherche appliquée et fonds privés, plus notre pays sera créatif. C’est le pont entre ces quatre domaines d’activité qui donne l’envie et les moyens d’entreprendre aux esprits vifs et bien formés de notre pays. J’en tiens Paris-Saclay pour preuve.

Dans l’enseignement comme dans la tech, l’expérience le montre : déconcentrer n’est pas diviser. Bien au contraire.

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