Le ferroviaire, une grande ambition à toutes les échelles

Le train fait partie de notre patrimoine national. Aujourd’hui autant qu’hier, je suis convaincu qu’il reste un moyen de transport attractif et un levier important pour le dynamisme de nos territoires.

Et il n’y a pas qu’en Île-de-France qu’on le pense.

En témoignent la grande qualité et les grandes ambitions du ferroviaire suisse, que j’ai eu l’occasion de découvrir du 15 au 17 novembre dernier lors d’un séminaire organisé sous l’égide du Groupement des Autorités Responsables de Transport (le GART).

Retour en trois points saillants sur trois jours très riches, plein de découvertes et de rencontres qui ont largement confirmé ma conviction : le ferroviaire est encore et toujours un moyen de transport d’avenir ! 

Quand l’agglomération s’adapte à la mobilité

A l’heure de la nécessaire décarbonation de nos déplacements, mettre le mass transit au cœur d’une ville respectueuse de tous est à la fois une évidence et un défi.

Défi pour lequel le regard de Sonia Lavadinho, anthropologue urbaine et fondatrice de Bfluid, est très éclairant. Nous avons eu l’occasion d’échanger sur le parvis de la gare de Bâle autour de la question des usages de la ville, entre multimodalité, espaces consacrés aux piétons et nécessité du verdissement de nos zones urbaines.

J’en tire une conviction : l’étude approfondie des comportements et usages urbains est essentielle pour mieux cerner les besoins des habitants en termes de mobilité, et ainsi aménager les espaces en conséquence. Les gares, places centrales par excellence et lieux de passages intensifs, sont ainsi les premières à nécessiter d’aménagements spécifiques pour servir au mieux les multiples usages de la ville.

En la matière, la gare de Bâle peut faire école, alors que s’y rencontrent trains, tramways, vélo, bus et piétons dans un espace dynamique et ouvert, sans être surchargé. L’accent n’est pas immédiatement mis sur l’esthétique de la gare, mais bien sur son efficacité. En évaluant le coût pour la collectivité de l’essentiel versus le « nice to have », la Suisse s’assure de déployer en priorité les budgets sur ce qui fait une différence quant au bon fonctionnement du mass transit et son intermodalité.

« Un voyage, un billet » : une mobilité pensée à l’échelle nationale 

En tant que vice-président d’Île-de-France Mobilités, les questions de modèle économique et du financement du rail me sont très familières. Il est important que nous soyons capables d’interroger le statu quo et de mettre sur la table toutes les options qui nous permettront d’améliorer la qualité de service proposée à nos concitoyens. 

Parmi ces options se trouve le modèle suisse, basé sur la standardisation et l’unification de l’offre de transport autour d’un titre commun : le Swiss Pass. Et qui de mieux qu’Helmut Eichhorn, directeur de l’alliance Swiss Pass, pour nous le présenter !

Swiss Pass, c’est d’abord un partenariat entre 250 entreprises de transport couvrant tout le territoire Suisse. Mais c’est aussi un objectif fort : simplifier et unifier l’offre de transport à toutes les échelles, sur le modèle « un voyage, un billet ». Et ça fonctionne : en Suisse, tous les moyens de transport sont éligibles, du train aux bus en passant par les bateaux et autres remontées mécaniques.

Le Swiss Pass, sésame universel de la mobilité helvète, permet ainsi d’intégrer un abonnement général qui donne accès à la quasi-totalité du réseau helvète de transports publics.

Un modèle auréolé de son succès à l’échelle du pays, et qui souligne l’importance de la standardisation de l’offre de transport. Les usagers sont en recherche de facilité et d’accessibilité. Réunir tous les moyens de mobilité en une offre globale et un titre unique permet de simplifier les transactions et de rendre nos transports plus attractifs, tant à l’échelle communale que nationale.

Tout cela sans un seul contrôle a priori de l’accès d’un mode de transport. On ne « valide » jamais. En revanche, gare à l’amende si vous êtes contrôlé aléatoirement durant le trajet sans titre de billet valide !

La gare de Delémont, grand exemple pour petite échelle

L’aménagement des gares et l’optimisation des réseaux de transport ne sont pas réservés aux grandes agglomérations.

J’ai pu le constater lors de notre visite de la gare de Délémont, petite commune des environs de Bâle, en compagnie de David Asséo, directeur de la section mobilité et transports du Canton du Jura.

Densification des alentours de la gare, variété de commerces et de services, interdiction de la circulation automobile, gare routière à proximité des quais… Ce cœur battant de Delémont nous prouve qu’une petite commune de grande banlieue n’est pas vouée à l’inaccessibilité. Au contraire : avec ses 120 trains quotidiens au départ, la ville est très insérée dans les réseaux suisses et européens, facilite la mobilité douce pour ses habitants et limitrophes et, in fine, s’érige en exemple d’aménagement au service du dynamisme urbain.

Au niveau national comme celui d’un canton ou d’une commune, c’est par une action concertée et au service d’un aménagement urbain raisonné que la Suisse fait de son système ferroviaire un succès populaire. Indiscutable, par ailleurs : les Suisses sont de loin les premiers consommateurs de train de l’OCDE avec près de 2 500km parcourus par personnes et par an.

C’est, à mon sens, le plus grand enseignement de ces 3 jours de visite en Suisse : pour le ferroviaire, nous devons avoir de grandes ambitions, à toutes les échelles.