Garantir le droit à la connexion

L’hiver de tous les risques ?

Quelle est la capacité de notre pays à subvenir à nos besoins en électricité dans l’hiver qui s’annonce ?

Chaque KWh économisé est précieux et le risque est élevé d’une pénurie que nous devrons compenser par des baisses de tension voire des coupures de courant. Dans les cas les plus extrêmes, Enedis prévoit même des interruptions jusqu’à deux heures d’affilée sur une zone donnée.

Au premier abord, on s’imagine mal la portée de telles mesures. Elle est pourtant énorme.

Cela va sans dire, en cas de coupures, l’alimentation en énergie des hôpitaux, casernes de pompiers, commissariats et autres services d’urgence serait préservée.

Mais les conséquences resteraient très importantes – et ce même si on fait abstraction des impacts directs à un instant t sur notre appareil productif ou sur la vie de particuliers dépendants qui, privés d’électricité, pourraient se retrouver dans des situations critiques.

Souffler le chaud et le froid

Il ne faut en effet pas oublier une chose : couper le courant, cela veut aussi dire… couper le réseau.

Avec des coupures d’internet et de téléphone, ce ne sont pas que les moyens de production industriels ou le commerce qui se retrouveraient à l’arrêt. Même les entreprises qui peuvent se passer de machines-outils ou de points de vente directs seraient prises dans une injonction contradictoire, entre encourager le télétravail pour réduire leur consommation d’énergie sur site et le risque de phases impromptues de chômage technique.

Pour les particuliers, c’est pire. Que les secours soient alimentés en électricité ou non, c’est une chose… Mais imaginez seulement : un appel d’urgence à passer au SAMU… et l’antenne-relais du quartier ne fonctionne plus.

Ces risques sont bien identifiés et ont déjà fait l’objet de discussions entre transporteurs, pouvoirs publics et opérateurs télécoms. Des discussions peu concluantes jusqu’ici, qui laissent l’incertitude entière.

D’un côté, Enedis renvoie au guide ORSEC du ministère de l’Intérieur qui régit les crises en matière d’approvisionnement énergétique : « l’utilisateur dont l’activité ne peut pas supporter une coupure ou une interruption d’un réseau doit s’équiper de moyens palliatifs. » De l’autre, la Fédération Française des Télécoms rétorque qu’il n’est tout simplement pas possible en matière logistique d’acheminer des groupes électrogènes de puissance suffisante à chacune des 60 000 antennes-relais de France.

Se concentrer sur l’essentiel

Arrêtons de jouer à nous faire peur : oui, le risque est là, mais nous sommes en France, et selon toutes vraisemblances nous devrions pouvoir éviter les drames.

Heureusement.

Rien que du point de vue réglementaire, des options restent sur la table, et certaines préfectures pourraient par exemple exclure certaines installations télécoms de ces opérations dites « de délestage » pour garantir un service minimum.

Néanmoins, le risque encouru sur le front de la connectivité soulève à mon sens une question un peu laissée de côté depuis que nous avons passé le gros de la crise sanitaire : aujourd’hui, pour notre société, qu’est-ce qui est essentiel ?

Hôpitaux, système de santé, acteurs de proximité, élus locaux : de ce côté, la crise sanitaire nous a rappelé de la plus forte des manières que nous ne pouvions pas nous en passer. Il semblerait qu’à la faveur d’une nouvelle crise, énergétique cette fois-ci, nous réalisons enfin à quel point nos infrastructures de télécommunication sont au cœur de notre mode de vie. Elles sont essentielles.

Pour demain, il devient essentiel pour l’Etat d’assurer et de garantir notre droit à la connexion.